samedi 22 septembre 2012

Europe, Lettre du député Staes sur les accords ADA et TLC

Accords de Libre échange entre l'Union Européenne
et l'Amérique Centrale (ADA) 
et la Colombie et le Pérou (TLC) 

Par Bart Staes

Lettre d'un parlementaire européen Verts, en réponse à ARLAC Belgique  : Chère Madame, cher Monsieur, Nous vous remercions beaucoup de votre lettre (en réponse à ARLAC Belgique) et l'intérêt que vous exprimez pour l'Accord d'Association (AdA) UE-Amérique central et l'Accord de Libre Echange UE-Colombie/Pérou. En fait, nous partageons largement vos soucis concernant ces deux accords.

A notre avis, un Accord d'Association avec l'Amérique central devrait répondre en premier lieu aux besoins de populations vivant dans des conditions difficiles, héritage d'un passé de guerres, de violence et d'impunité, qui est loin d'être surmonté. 

L'amélioration du niveau de vie, l'accès aux services publics, tels que la santé et l'éducation, garanti à tous les citoyens et toutes les citoyennes, et finalement un environnement non pollué et la sécurité dans la vie quotidienne devraient être les priorités d'une coopération entre l'UE et l'Amérique central.

Malheureusement, l'AdA va dans un sens très différent. Par rapport au commerce des biens, l'UE a imposé des quotas d'exportation de produits laitiers, huile, vin, spiritueux et viande, qui nuiront beaucoup la production locale et paysanne.

En ce qui concerne les règles de commerce, l'UE a négocié des libéralisations bien au-delà de ce qui stipule  l'Organisation Mondiale de Commerce (OMC). 

Ces libéralisations promouvront la consolidation de grandes entreprises multinationales dans les secteurs de télécommunication, d'énergie, de eau, plus propices à livrer des services aux activités extractives (minières et d'agriculture industrielle) dont cous parlez, qu'aux services de base. 

Elles concernent également le secteur des achats publics. Nous regrettons fortement qu'ainsi, les pays d'Amérique central renoncent à un instrument important de politique industriel et de création de travail

Les libéralisations prévues pour le secteur bancaire et financier en général nous semblent également critiquables. Au lieu de s'attaquer aux causes de la crise financière actuelle, les provisions vont dans un sens contraire à ce que les autorités envisagent en Europe. 

Des possibilités de supervision et contrôle du secteur financier extrêmement précaires, l'abandon d'échanges d'information automatiques et de contrôle de devises, la réaffirmation du secret bancaire et la liberté totale de transfert de devises ne feront que renforcer des activités spéculatives et de manipulation de bilans d'entreprises. 

Bien que les provisions des accords soient réciproques, elles ne prennent pas en compte les asymétries de pouvoir et de capacités industrielles et institutionnelles existant entre les pays fortement industrialisés de l'Union européenne et les pays en voie de développement en Amérique latine.  

Tout de même, le risque est grand que des activités spéculatives et de nouveaux produits financiers insécurisés développés sous les règles laxistes des deux accords entrent dans le marché européen à travers les paradis fiscaux qu'elle maintient dans en son sein, avec des conséquences qui puissent être néfastes.

Finalement, les efforts d'appui à l'intégration régionale se limitent aux aspects d'union douanière, important surtout pour l'activité commerciale européenne, et ne visent pas d'abord le développement d'institutions en commun.

L’Accord de Libre Échange avec le Pérou et la Colombie, lui, est même le produit d'une rupture de la logique d'intégration régionale, puisque il remplace le projet initial d'un Accord d'Association avec l'ensemble des quatre pays de la Communauté Andine.

Il est important de noter que le texte de ce dernier accord est presque identique à celui de l'AdA avec l'Amérique central. Il en suit que les intérêts spécifiques des chacun des pays et secteurs n'a été tenu en compte que très peu et que les accords suivent les d'emblée les gabarits européens.

Pour finaliser, nous sommes très critiques  vis-à vis la question des droits de l'homme. Ni la clause des droits de l'homme ni le chapitre sur le Développement Durable dans les deux accords, nous semblent fournir des instruments adéquats pour lutter contre le taux très élevé de violations de droits de l'homme dans presque l'ensemble des pays concernés. 

Vu que les huit pays visés bénéficient actuellement du Système de Préférences Généralisés plus (SPG +) européen, qui comprend des possibilités de sanctions jamais exploités, il n'y a aucune raison de croire que ceci changera avec les accords de libre commerce.

Comme vous venez de voir à l'aide de cette liste non-exhaustive d'exemples du domaine des libéralisations prévues dans les deux accords, nous avons une position extrêmement critique par rapport aux deux accords. 
Évidemment, nous allons voter contre  ces accords, lors du vote prévu pour le mois de septembre 2012 au Parlement européen. 

Nous espérons que votre lettre, et vos campagnes aideront à convaincre un nombre suffisamment haut d'élus européen pour permettre que l'accord ne soit pas mis en vigueur, et pour donner lieu à des nouvelles négociations d'accords qui bénéficieront les populations, et non pas en premier lieu les entreprises.

                           
                           Cordialement,


Bart STAES - député européen belge (depuis 1999)
Les Verts/ Groupe Alliance Libre au parlement européen



Article en relation sur le blog Libres Amériques :  



Source : publié le 31 août 2012 par ARLAC.be